La semaine passée, dans cette trilogie d’articles cherchant à répondre à la question : « en quoi le coaching peut-il développer le sens au travail ? », je vous proposais une introduction et quelques repères. Cette semaine,  il sera question du sens au travail et de la perte de sens dans ce même contexte de travail.
Combien de fois avons-nous entendu ces expressions : « je me demande quel sens à mon travail aujourd’hui », « ça n’a pas de sens, ce qu’on me demande de faire », « cela tombe sous le sens », «c’est en dépit du bon sens » ? Nous ont-elles permis de comprendre le sens de ce que ceux qui les ont employés voulaient nous communiquer ?
Le dictionnaire Larousse décline plusieurs définitions du mot « sens », du latin sensus dont celle-ci qui correspond à notre sujet: « raison d’être, valeur, finalité de quelque chose, ce qui le justifie et l’explique : donner un sens à son existence. »[1] Par sa racine germanique sumo, il signifie la direction, l’orientation que prend quelque chose.
Parmi les derniers travaux scientifiques sur la question, la définition la plus commune est celle d’Estelle MORIN (2008)[2] qui combine trois éléments pour définir le sens au travail. Il est un effet, un produit de l’activité humaine et se forme, se construit à partir de la signification (sensus) et de la valeur qu’il a pour celui qui l’exécute,  de l’orientation (sumo), de la direction, de ce que recherche la personne dans son travail et ce qui guide ses actions et de la cohérence entre la personne et le travail qu’elle accomplit, entre ses attentes, ses valeurs et les gestes posés quotidiennement dans le milieu de travail.
Cette définition nous donne de comprendre combien ce peut être une donnée complexe, subjective, difficile à prendre en compte pour une entreprise mais il est pourtant crucial de s’y intéresser. Les différentes enquêtes menées sur le travail, au cours des vingt dernières années, révèlent une montée des dimensions expressives du travail partout en Europe. Les attentes que placent les Européens et en particulier les Français sur le travail sont considérables. 67% d’entre eux considère le travail comme très important et si pour 84% des Européens, le fait de bien gagner sa vie est un des aspects importants du travail, une importance de plus en plus grande est accordée au contenu, à l’intérêt du travail et à l’ambiance de travail. Selon l’enquête sur les valeurs des européens (E.V.S – Europeans Values Surveys) de 1999, 78% des français pensent que le développement personnel passe par le travail.[3]
Conjointement à l’évolution de la représentation du travail et de sa signification, les conditions de l’activité ont connus de profonds bouleversements au niveau de l’organisation du travail liés au développement de la flexibilité, des moyens de communication, à la recherche de la performance dans un contexte frappé par l’augmentation du chômage et les effets de la mondialisation. Ces mutations ont eu pour conséquences une intensification du travail et l’émergence d’un malaise au travail, d’un mal-être des travailleurs.
En 2016, Mats ALVESSON et André SPICER révèle la dénomination du trouble psychosocial lié à la perte de sens au travail : le brown-out, qui signifie littéralement “baisse de courant”. Ce terme avait été employé pour la première fois en 2015 par Michael KIBLER dans un article de la Harvard Business Review intitulé : « Prevent Your Star Performers from Losing Passion for Their Work »[4]. Ces chercheurs définissent le brown-out comme un désinvestissement progressif du salarié causé par une incompréhension totale des tâches à accomplir et des missions confiées qui lui apparaissent comment inutiles, absurdes voir nuisibles rendant flou voir opaque son rôle dans la structure de l’entreprise et heurtant ses valeurs personnelles.
Par ailleurs, en 2010, un article sur les risques psychosociaux[5] paru sur le site du ministère du Travail, intègre la perte de sens dans les facteurs de risques psychosociaux que sont les conflits de valeurs et de la qualité empêchée. Lorsque la perte de sens au travail apparaît, elle va produire chez la personne un désengagement progressif vis-à-vis de son travail, des tâches qu’elle a à accomplir, de sa manière de s’impliquer dans son travail et dans sa relation avec ses collègues. Ce déséquilibre dans la relation qui la lie à son environnement professionnel va générer en tout premier lieu comme trouble de la santé du stress.
Prendre davantage en compte le sens au travail dans la prévention des Risques Psychosociaux est fortement recommandé aujourd’hui et un accompagnement de type coaching peut être une solution. C’est ce que nous verrons dans le dernier article sur le sujet la semaine prochaine.

[1] Larousse (2019), Définition du mot sens [en ligne]. Disponible sur : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/sens/72087 [Consulté le 23 mars 2019]

[2] MORIN Estelle. Donner un sens au travail. 2006. Disponible : http://docplayer.fr/docview/40/21773181/#file=/storage/40/21773181/21773181.pdf

[3] DAVOINE L. et MÉDA D. Place et sens du travail en Europe: une singularité française ? 2008. hal-00276220

[4] KIBLER M. . Prevent Your Star Performers from Losing Passion for Their Work. In Harvard Bussiness Review (H.B.R). [en ligne]. 14/01/2015. [Consulté le 1er avril 2019]. Disponible sur : https://hbr.org/2015/01/prevent-your-star-performers-from-losing-passion-in-their-work

[5] Ministère du Travail, 15/09/2010. Date de dernière mise à jour : 08/03/2018. Disponible sur : https://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/prevention-des-risques-pour-la-sante-au-travail/article/les-rps-c-est-quoi

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